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Le Théâtre du Mauvais Garçon

Je voulais une autre chronique de Jean Marois...

Dernière mise à jour : 7 juin 2022



Comment on fait pour rendre hommage à un collègue, un mentor et je l'espère un ami... J'aurais pu lui écrire un texte... lui laisser un message sur sa boîte vocale... J'aurais pu beaucoup de choses. Je suis tombé sur un de ses textes écrits dernièrement et j'ai décidé de tout simplement lui laisser de la place à lui et de le mettre en lumière pour une fois... Il m'a gentiment donné la permission de reproduire son texte, c'est ce que j'ai fait afin qu'il puisse vous parler directement à vous les amoureux de la culture...


Le lundi 06 juin en fin d’avant-midi, j’ai terminé ma dernière partie de travail pour l’OSTR. Ah non, pas encore une retraite direz-vous…

Remettons les choses au clair, mi-août 2019 mon contrat de fournisseur de service technique pour une organisation de Trois-Rivières prenait fin. J’avais décidé à l’époque de garder quelques petits contrats ça et là, je ne me sentais pas prêt pour le grand saut…

Évidemment, les choses peuvent se passer différemment des attentes que l’on a, et au final, je n’ai conservé que mon rôle avec l’orchestre…

Mais, c’est terminé, la boucle de ma vie professionnelle c’est achevé en beauté avec Harmonium en Symphonie, ne vous méprenez pas, je n’avais qu’un tout tout petit impact sur cette gigantesque production, mais ça prend des grains de sable pour faire du ciment…

Il y a eu la place de l’Hôtel de ville au milieu des années ’70 ou j’écoutais assis sur un banc en soirée la musique d’Harmonium et puis une longue succession d’événements tout aussi gratifiant les uns que les autres se sont enchaînées dans ma vie, mais, il faut une fin à tout, ça passe tellement vite que l’on éprouve du vertige lorsque l’on comprend que c’est la fin, on se dit PAS DÉJÀ…

J’ai été un technicien de scène toute ma vie, pas un directeur de quelque chose, je déteste les titres, je n’étais qu’une partie de l’ensemble de l’événement, c’est vrai le milieu à beaucoup évolué depuis 1978, en bien pour beaucoup, mais aussi en mal, faut oser le dire, faudrait en parler, mais plus avec moi…

Mon corps que j’ai négligé toute ces années, me rappelle aujourd’hui que je suis humain, problème d’articulation, difficulté à dormir, problème de mémoire (oui, parfois je vous croise et je ne me souviens plus de votre nom), mais je ne me plains pas, ce ne sont que de petits bobos, d’autres sont morts du cancer ou en souffre encore, alors mes genoux y’a rien là…

Je suis maintenant un fantôme (oui comme la bande dessinée, ah vous êtes trop jeunes, tant mieux), vous me sentirez rôder sur les plateaux ou sur les lieux de tournage, ce petit bruit lors de la fermeture ce sera moi qui viendrai vous hantez…

Je serai dans vos pires cauchemars (you’re wildest dreams) lorsque vous aurez de la difficulté à dormir ou que vous aurez des problèmes à résoudre, que la fatigue sera trop intense et l’adrénaline vous empêcheras de dormir (ce sera moi ? Peut-être qui sait) …

Mais, je serai aussi dans vos rêves les plus réparateurs. Lorsqu’un problème vous semblera impossible à résoudre, vous penserez à moi, qu’aurait-il fait ce «fucké» ? Et vous vous souviendrez de nos beaux moments, de nos rires, de nos accolades…

Et là, juste à ce moment précis, vous trouverez la solution, parce qu’il y a toujours une solution, suffit de la cueillir et moi je vous aiderai à vous rappeler que c’est ensemble et seulement ENSEMBLE que l’on peut y arriver…

Les techniciens de scène, c’est la fondation, mais comme la fondation de votre maison on ne la remarque pas, elle est cachée parfois, et les gens ne regardent que la beauté des murs ou du toit, mais, la fondation peut être fragile faut lui apporter des soins également…

Vous me croiserez peut-être sur un plateau ou sur la rue, je vous saluerai humblement, mais vous pourrez vous dire, voilà un vieux monsieur heureux de sa vie, qui a fait un métier merveilleux qui le comblait malgré les difficultés et les horaires atypiques. Voilà, j’ai été heureux presque toujours dans ce métier de fou, le plus beau au monde…

Il me reste pleins de choses à accomplir, mais moins rapidement et plus familialement, je ne suis pas mort et je n’espère pas que ça arrive bientôt…

Alors, prenez-vous en main et devenez heureux dans ce métier de fou, comme dans la vie, ça passe tellement vite…

Il y a eu un jour d’octobre 1978 et il y a maintenant un jour de juin 2022, je n’étais pas le meilleur, ni le pire, quelque part entre les deux...

Fiou, ça aurait pu être pire, merci à tous…

Jean Marois

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